Photo: ANAFAELa Cour suprême de Justice du Honduras a déclaré le caractère inconstitutionnel de la Loi sur la protection des obtentions végétales adoptée en 2012 par le Congrès de ce pays d'Amérique centrale. Également connue sous le nom de Loi Monsanto, cette législation interdisait la conservation, le don et l’échange de semences. Cette initiative a eu lieu dans le contexte de la progression de l'UPOV (Union internationale pour la protection des obtentions végétales), une organisation qui, comme l'explique GRAIN, « travaille exclusivement et explicitement à la privatisation des semences dans le monde entier, en imposant des droits de propriété intellectuelle sur les variétés végétales ». L'État hondurien est l'un de ceux qui a adhéré à la Convention UPOV. L’Association nationale pour la promotion de l’agriculture biologique (ANAFAE) – un collectif qui défend depuis plus de 25 ans l'agriculture biologique et la souveraineté alimentaire au Honduras – dénonce cette loi depuis qu'elle a été adoptée. En 2016, elle avait déposé un recours en justice pour la déclarer inconstitutionnelle, mais ce recours a été rejeté. Deux ans après, des collectifs de paysans et de producteurs indépendants ont déposé un autre recours, entraînant une déclaration d'inconstitutionnalité de la loi au mois de novembre dernier, rendue publique à la fin du mois de janvier 2022.Dans la déclaration d'inconstitutionnalité, 5 points prédominent :1) « Le décret législatif n° 21-2012 porte atteinte à la souveraineté et à libre détermination de notre pays, en octroyant des droits d'obtention sur nos semences et variétés végétales natives à des fins éminemment commerciales au détriment de la liberté de disposer de nos richesses et ressources naturelles ». 2) « La Convention UPOV, via le décret législatif n° 21-2012, viole les préceptes constitutionnels favorables à la vie, à la dignité humaine et au droit des Honduriens à un niveau de vie adéquat ». 3) « Porte atteinte au droit humain à l'alimentation et à la santé comme à celui des peuples de disposer d'aliments nutritifs, sains et adaptés culturellement, en termes d'accessibilité, de disponibilité et d'innocuité ». 4) « Le décret 21-2012, de par son contenu, contredit l'article 145 de la Constitution qui reconnaît l'obligation de l'État Hondurien de préserver un environnement approprié pour la protection de la santé de ses habitants ». 5) « Le décret législatif 21-2012, relatif à la Loi sur la protection des droits d'obtention végétale, contrevient au devoir de l'État hondurien de protéger nos cultures natives et les droits des agriculteurs reconnus par la Constitution et au niveau international ».Par ces motifs, la Cour suprême de Justice du Honduras a décidé à l'unanimité de déclarer « l'inconstitutionnalité totale de la LOI SUR LA PROTECTION DES OBTENTIONS VÉGÉTALES, en ce qu'elle enfreint, restreint et sape les normes constitutionnelles et traités internationaux signés par le Honduras et les normes internationales relatives à la protection du droit à une alimentation adéquate ».Pour l'ANAFAE, plutôt que d'encourager la privatisation des semences, l'État devrait promouvoir les foires où on les échange et on les vend, et soutenir le flux de matériel génétique pour l'agriculture et l'alimentation entre paysans et peuples autochtones du Honduras. De plus, il devrait faciliter la conservation, la gestion et l'utilisation des semences locales en tant que stratégie d'adaptation au changement climatique.Les semences sont essentielles à la vie et au respect du droit humain à l'alimentation. Sans semences, il n'y a pas d'aliments, et sans aliments, il n'y a pas de peuples. Après 10 ans de lutte, les paysans du Honduras ont remporté une victoire décisive pour la défense de la vie et de la souveraineté alimentaire.