Sur le plan international, un débat fait rage sur l’Acte de 1991 de la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV 1991) et son impact sur les besoins fondamentaux des familles paysannes et la conservation de la biodiversité. De nombreuses interrogations sont soulevées : faut-il nécessairement mettre en place un système de protection des obtentions végétales (POV) dans les pays les plus pauvres, où les marchés sont limités ? Existe-t-il un système approprié de protection des obtentions végétales pour les pays où la plupart des semences sont produites et distribuées par de petits agriculteurs qui jouent également un rôle essentiel pour assurer l’approvisionnement alimentaire de base ?Dans la région couverte par l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI), ce débat dure depuis une vingtaine d’années. En 1999, sous l’influence des institutions basées à Genève, de pays développés et de leur industrie semencière, l’OAPI a introduit dans l’Accord régional de Bangui l’annexe X sur la protection des obtentions végétales – sur le modèle de l’UPOV 1991. L’adoption de l’annexe X fait suite aux promesses de transformation de l’agriculture par l’émergence d’un secteur des semences commercialement compétitif, l’investissement étranger dans la sélection, la disponibilité de nouvelles variétés végétales étrangères, d’importants revenus de redevances pour les instituts nationaux de recherche et un bénéfice global accru pour toutes les couches sociales.Cependant, dès le début, la pertinence de l’annexe X pour une région qui dépend du système semencier géré par les agriculteurs (également connu sous le nom de système semencier paysan, ou encore secteur semencier informel) a été sérieusement contestée. En outre, le processus d’élaboration de l’annexe X avait été fondé sur des données ni probantes ni inclusives. Il est important de noter que le processus a ignoré les besoins et les intérêts des principaux acteurs agricoles de la région : les communautés agricoles locales.Plus de 10 ans après l’entrée en vigueur de l’annexe X le 1er janvier 2006, le présent document de travail examine comment cette annexe a été mise en œuvre et l’impact et la pertinence de l’UPOV 1991 pour la région. En particulier, il détaille si les promesses de l’UPOV 1991 ont été tenues pour les 17 pays de la région OAPI, alors que douze de ces pays sont classés par les Nations unies dans la catégorie des pays les moins avancés.Pour répondre à ces questions, les auteurs ont étudié l’histoire de l’OAPI et l’élaboration de l’annexe X et mené plus d’une vingtaine d’entretiens avec des fonctionnaires, éleveurs et agriculteurs au Mali, Sénégal, Bénin, Cameroun et Niger ainsi que dans les bureaux de liaison nationaux et le secrétariat de l’OAPI.Les résultats de l’enquête sont stupéfiants. Cette dernière met en évidence un système de protection des obtentions végétales incohérent qui ne correspond pas aux conditions socio-économiques et agricoles qui prévalent dans la région. Alors qu’on en attend encore les avantages, les États sont déjà accablés par les coûts de sa mise en œuvre. Cela montre, une fois de plus, que l’approche descendante consistant à exporter des cadres juridiques destinés aux pays développés vers des pays en développement qui ont des contextes différents, est une stratégie coloniale imparfaite, avec des coûts importants et des occasions manquées pour les populations de la région de l’OAPI.Téléchargez le document de travailSource : http://www.apbrebes.org/news/dysfunctional-plant-variety-protection-system-ten-years-upov-implementation-francophone-africa