Le lobby qui cherche à industrialiser la production alimentaire en Afrique ne se contente pas d'injecter de l'argent dans des projets de plantations sur le terrain, il modifie également la législation africaine pour qu'elle serve les intérêts de l'industrie agroalimentaire étrangère. Telle est la principale conclusion d'un nouveau rapport de deux organisations de la société civile, l'AFSA (Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique) et GRAIN. Le rapport, « Remise en cause des lois foncières et semencières », fournit des informations sur ceux qui poussent à des changements sur ces deux enjeux dans toute l'Afrique. Washington DC, où se trouvent les sièges de la Banque mondiale, du Millennium Challenge Corporation et de l'USAID (Agence américaine pour le développement international), s'avère en ce moment la principale force qui pousse à la privatisation des ressources agricoles africaines. Mais l'Europe, à travers l'Union européenne et divers mécanismes de financement des donateurs, est aussi très impliquée et apporte à la fois de l'argent et des cadres juridiques tels que le dispositif de brevetage des végétaux connu sous le nom d'UPOV. « Plus de 80 % des semences en Afrique sont produites et diffusées à travers des systèmes de semences « informels », c'est-à-dire par une conservation des semences dans l'exploitation et des échanges entre agriculteurs », souligne Bridget Mugambe de l'AFSA. « La marginalisation et la criminalisation des semences de ferme par le biais de l'UPOV et l'introduction de régimes de commercialisation stricts seront une aubaine pour les multinationales des semences, mais un désastre pour nos petites exploitations familiales », remarque-t-elle. La stratégie de privatisation des terres fait également peser une menace importante. « Au nom de la sécurisation foncière, qui peut paraître formidable pour des communautés rurales vulnérables, les donateurs et les gouvernements africains poussent en fait à la mise en place de marchés fonciers de type occidental, basés sur des instruments formels comme des titres et des baux qui peuvent être négociés d'une façon ou d'une autre », explique Ange David Baïmey de GRAIN. « En fait, l'objectif explicite de nombreuses initiatives, comme la Nouvelle Alliance du G8, visent à la sécurisation des droits fonciers des investisseurs. » L'idée est de rendre l'Afrique plus attrayante pour les entreprises.Mais cela ne fera qu'affaiblir les droits des communautés rurales et les empêcher de continuer à être le pilier des systèmes alimentaire et agricole de la région. Le rapport « Remise en cause des lois foncières et semencières : qui tire les ficelles des changements en Afrique ? » est disponible à l'adresse grain.org/e/5122 Pour plus d'informations, veuillez contacter : Bridget Mugambe, AFSA, Kampala (EN) [email protected] +256775692499 Ange-David Baïmey, GRAIN, Accra (FR) [email protected] +233269089432 L'AFSA, l'Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique, est une structure panafricaine à laquelle appartiennent des réseaux et des organisations d'agriculteurs travaillant en Afrique. Les membres de l'AFSA représentent des petits exploitants agricoles, des éleveurs nomades, des peuples indigènes, des citoyens et des écologistes d'Afrique qui s'expriment d'une voix forte pour orienter les politiques du continent en matière de droits des communautés, d'agriculture familiale, de promotion des savoirs traditionnels et d'environnement. GRAIN est une petite organisation internationale à but non lucratif qui soutient la lutte des paysans et des mouvements sociaux pour renforcer le contrôle des communautés sur des systèmes alimentaires fondés sur la biodiversité.