Les « Exxon de l'agriculture » doivent être tenus à l'écart des négociations de la COP21 de Paris Selon un nouveau rapport de GRAIN, les fabricants d'engrais figurent parmi les principaux ennemis du climat au niveau mondial. Leurs produits pourraient être responsables de près de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), sans parler des dommages entraînés pour les cours d'eau, les sols et la couche d'ozone. Mais les politiques visant à sevrer l'agriculture de sa dépendance actuelle vis-à-vis des engrais chimiques sont actuellement affaiblies par les efforts du lobby de l'industrie des engrais. Le rapport de GRAIN montre comment les producteurs d'engrais ont infiltré les principaux processus politiques portant sur l'agriculture et le climat pour faire des engrais chimiques une solution au changement climatique et pour affaiblir le soutien en faveur d'une agriculture non chimique. Sous la bannière de l'« agriculture intelligente face au climat », les fabricants d'engrais travaillent en partenariat avec d'autres entreprises agroalimentaires pour faire pression et obtenir des programmes volontaires, sous le contrôle des entreprises qui font la promotion de l'utilisation d'engrais, comme le programme d'agriculture intelligente face au climat de Wal-Mart ou la Nouvelle vision pour l'agriculture du Forum économique mondial. Les fabricants d'engrais exercent également leur emprise sur la seule initiative intergouvernementale qui a émergé à ce jour sur le changement climatique et l'agriculture. Parmi les membres fondateurs et le comité directeur de l'Alliance mondiale pour une agriculture intelligente face au climat, lancée l'an dernier au cours du Sommet des Nations Unies sur le changement climatique, figurent essentiellement des producteurs d'engrais, leurs groupes-écrans et des organisations qui travaillent en partenariat avec elles. « Les producteurs d'engrais, comme le norvégien Yara, sont les Exxon de l'agriculture », explique Henk Hobbelink, le Coordinateur de GRAIN. « Ils entretiennent un modèle d'agriculture qui est en train de détruire la planète et ils font tout ce qui est en leur pouvoir pour bloquer les initiatives sur le changement climatique qui pourraient nuire à leurs profits. » Selon le rapport de GRAIN, de récentes études montrent que la contribution globale des engrais chimiques au changement climatique a été considérablement sous-estimée. Les calculs effectués par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) portant sur les émissions d'oxyde nitreux générées par l'utilisation d'engrais chimiques sont 3-5 fois inférieures à ce que tendent à indiquer ces études. Les chiffres obsolètes du GIEC ne tiennent pas compte de l'accroissement mondial de la production d'engrais, de la dépendance accrue par rapport au gaz de schiste en tant que matière première ou des impacts destructeurs des engrais chimiques sur la matière organique, qui représente le puits de carbone le plus important de la planète. « Nous pouvons maintenant dire que l'utilisation d'engrais chimiques cette année va générer plus d'émissions de GES que les émissions totales de l'ensemble des voitures et des camions aux États-Unis ! » explique Devlink Kuyek, chercheur à GRAIN. « La bonne nouvelle, c'est qu'il existe une solution rapide pour résoudre ce problème : une transition mondiale vers des pratiques agroécologiques simples qui peuvent parvenir aux mêmes rendements sans produits chimiques. » La recherche montre que les agriculteurs peuvent arrêter d'utiliser des engrais chimiques sans diminuer les rendements s'ils adoptent des pratiques agroécologiques. C'est également la conclusion soutenue en 2008 par l'Évaluation internationale des sciences et technologies agricoles au service du développement, un processus intergouvernemental sur trois ans faisant intervenir plus de 400 chercheurs, qui a été financé par la Banque mondiale et l'ensemble des agences compétentes des Nations Unies. « Nous pourrons facilement nous débarrasser de notre addiction aux engrais toxiques dans notre système alimentaire une fois que nous aurons desserré l'emprise du secteur des engrais sur les décideurs politiques », explique H. Hobbelink. « Pour commencer, il faut mettre fin à l'Alliance mondiale pour une agriculture intelligente face au climat et exclure le lobby des engrais des négociations sur la COP21 à Paris. » Le rapport de GRAIN, « Les Exxon de l'agriculture » est disponible en ligne sur : https://www.grain.org/e/5271. Pour plus d'informations, veuillez contacter : Devlin Kuyek à Montréal (EN, FR): +15145717702 ou [email protected] Henk Hobbelink à Barcelone (EN, ES, NL): +34933011381 ou [email protected]