Les paysans du nord du Mozambique se battent pour garder leurs terres, alors que les gouvernements et les entreprises étrangères s’emploient à réaliser de vastes projets agro-industriels de façon de plus en plus agressive. On soutient aux populations que ces projets leur seront bénéfiques. Mais jusqu’à présent, l’expérience de l’investissement étranger en matière d’agriculture a été désastreuse pour le pays. Ce rapport concerne les entreprises qui sont déjà en train de s’installer dans le couloir de Nacala, une zone désignée en priorité par le gouvernement pour le développement de l’agrobusiness. Ces entreprises, dont l’organisation passe généralement par des paradis fiscaux offshore et qui sont souvent liées aux élites politiques mozambicaines, s’emparent des terres et accaparent les richesses du pays, d’une manière qui n’est pas sans rappeler la période du colonialisme. De la libération à l’accaparement des terres Le Mozambique a déclaré l’Indépendance le 25 juin 1975, après dix ans de lutte armée. Les paysans, les travailleurs et les étudiants du Mozambique avaient vaincu l’empire portugais, guidés par un même idéal, « la liberté de l’homme et de la terre ». Les idéaux de la lutte pour la libération de la nation sont entérinés dans la première constitution de la République, qui reconnaît le droit du peuple mozambicain à résister à toute forme d’oppression. Ils résonnent aussi dans l’hymne national de la République du Mozambique, qui promet de faire du pays la tombe de l’impérialisme et de l’oppression. La terre fut un facteur particulièrement important dans la lutte du pays pour sa libération. Les colons portugais avaient occupé de vastes territoires, choisissant les terres les plus fertiles du pays. Quand le Mozambique a obtenu son indépendance, ces terres ont été immédiatement reprises et nationalisées. Dans le cadre de la Constitution de 1975, l’État – au nom du peuple mozambicain - est devenu le propriétaire de toutes les terres du pays. La Constitution reconnaissait aussi l’agriculture comme le fondement du développement et l’industrie comme le moteur principal de celui-ci ; le développement devait être étayé par une politique d’industrialisation du pays, menée par des entreprises d’État et des coopératives. Mais une guerre civile brutale s’est déclarée un an seulement après l’Indépendance. Elle ne s’est terminée qu’en 1992, avec la création d’une Seconde République, suite à l’Accord général de paix entre le Gouvernement et RENAMO [Résistance nationale mozambicaine] signé à Rome. Le pays a ensuite connu deux décennies d’ajustements structurels imposés par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI). Aujourd’hui, 40 ans après l’Indépendance, la vision révolutionnaire du mouvement de libération nationale est en lambeaux et le gouvernement mozambicain est largement dominé par une idéologie néolibérale qui dépend étroitement de l’investissement étranger pour le développement de tous les secteurs de l’économie, qu’il s’agisse de l’agriculture, des infrastructures, de la pêche, du tourisme, de l’extraction des ressources, de la santé ou de l’éducation. L’investissement étranger a donc connu une expansion rapide dans le pays au cours des dernières années. Selon la Banque nationale du Mozambique, le flux net de l’investissement direct étranger (IDE) atteignait 5,9 milliards de dollars US en 2013, soit une augmentation de 15,8 % par rapport à 2012, faisant du Mozambique la première destination des IDE en Afrique.1 Une grande part de ce capital a été consacrée à l’extraction des ressources, comme les activités minières et la prospection pétrolière. Mais l’agriculture émerge également comme une cible importante pour les entreprises étrangères, particulièrement dans le couloir de Nacala, une vaste zone de terres fertiles qui s’étendent dans tout le nord du Mozambique, où des millions de familles paysannes vivent de l’agriculture. Ce que reflètent ces investissements, c’est avant tout la force de l’alliance entre le capital international – via les grandes multinationales, assurées du soutien des gouvernements de leurs pays – et l’élite politico-économique locale. L’intention est clairement d’exploiter les principales régions agroécologiques du pays et le potentiel minier et pétrolier. C’est dans ce contexte que notre recherche analyse les mouvements des différents acteurs qui occupent et s’approprient le couloir de Nacala, l’une des régions les plus riches du pays qui abrite non seulement les principaux écosystèmes, mais aussi des réserves de ressources minérales. Une nouvelle ère de plantations dans le nord du Mozambique Cet élan d’intérêt des pays étrangers pour les terres agricoles n’est pas spécifique au Mozambique. Sur tout le continent africain, on assiste à une ruée sur les terres agricoles. Depuis 2008, des entreprises étrangères ratissent l’Afrique à la recherche de terres fertiles pour cultiver des produits agricoles destinés à l’exportation. Des centaines de transactions couvrant des millions d’hectares ont été signées. La ruée sur les terres africaines s’explique en partie par la crise des prix agricoles de 2008 : pour les pays dépendant des importations pour couvrir leurs besoins alimentaires, il devenait difficile de trouver des sources d’approvisionnement à des prix abordables. Pour répondre à ce problème, certains des plus riches pays importateurs de nourriture, comme les États du Golfe, la Chine et le Japon, ont adopté de nouvelles mesures encourageant leurs entreprises à acquérir de grandes fermes à l’étranger, pour y produire de la nourriture qui serait ensuite exportée vers leur pays. L’Afrique est considérée comme l’une des nouvelles frontières où les produits agricoles peuvent être cultivés à bas prix et exportés pour satisfaire une demande mondiale toujours croissante. L’année 2008 a aussi été marquée par une grave crise financière mondiale. Face à l’effondrement des marchés boursiers, l’industrie de la finance a commencé à chercher de nouveaux actifs plus sûrs et plus rentables pour y placer les billions de dollars qu’elle a à sa disposition. En l’espace de quelques années, des centaines de nouveaux véhicules financiers ont ainsi été créés pour faire passer l’argent dans les acquisitions de terres et d’exploitations agricoles. De surcroît, les principales entreprises agroalimentaires mondiales s’intéressent de plus en plus à l’Afrique. Les marchés du Nord sont saturés et pour des sociétés comme Monsanto, Olam, Yara et Nestlé, l’Afrique représente une nouvelle source de profit encore à peine exploitée. Cependant, les terres, les semences et les systèmes alimentaires africains sont encore la plupart du temps aux mains des petits agriculteurs et éleveurs, qui nourrissent leur famille et les marchés locaux, hors du système des grandes chaînes alimentaires et agricoles mondiales. La croissance de ces grandes entreprises suppose que l’agriculture paysanne soit remplacée par de vastes plantations industrielles et que les grandes chaînes alimentaires prennent la place des systèmes alimentaires locaux, depuis les semences jusqu’aux étagères des supermarchés. Tout ceci signifie que, dans toute l’Afrique, les petits agriculteurs et éleveurs subissent des pressions de plus en plus fortes de la part des gouvernements et des entreprises pour renoncer à leurs terres et à leurs ressources en eau. Selon un rapport publié en 2010 par la Banque mondiale, plus de 70 % des acquisitions de terre agricole à grande échelle qui ont eu lieu au niveau mondial dans les dernières dix années concernent l’Afrique subsaharienne, en particulier l’Éthiopie, le Soudan et le Mozambique. Le Gouvernement du Mozambique a cherché sans vergogne à attirer dans le pays cette vague d’investissement agricole étranger, et notamment dans le couloir de Nacala, situé dans le nord du pays. Il travaille main dans la main avec les gouvernements et les donateurs internationaux, le Japon et le Brésil surtout, pour mettre en place un énorme programme connu sous le nom de ProSavana, qui vise à transformer 14 millions d’hectares de terres actuellement cultivées par de petits paysans et desservant les marchés locaux en des exploitations agricoles gigantesques gérées par des entreprises étrangères et destinées à la production bon marché de produits agricoles à exporter. Plus de 60 mouvements sociaux, l'environnement, paysanne et d'autres organisations de la société civile du Mozambique, du Brésil et du Japon ont participé à la première Conférence triangulaire des peuples tenue à Maputo, les 7 et 8 Août 2013. L'objectif de la Conférence était de renforcer l'articulation internationale des stratégies pour résister à la programme de ProSavana. En savoir plus sur la première Conférence triangulaire ici (en portugais), et plus sur la seconde ici (en anglais).2 L’Union nationale des paysans du Mozambique (UNAC) mène une campagne pour sensibiliser à la situation du couloir de Nacala et organiser l’opposition à ProSavana. La force de l’opposition nationale et internationale a contribué à ralentir le projet et à faire dérailler certains des éléments les plus agressifs de l’accaparement. Cela ne veut pas dire que le gouvernement et les entreprises étrangères ont renoncé à l’idée de prendre le contrôle des terres et des ressources en eau du couloir de Nacala pour y développer l’agrobusiness. En janvier 2014, des responsables gouvernementaux de haut rang et des hommes d’affaires se sont rassemblés pour assister à la présentation d’un nouveau projet de développement dans le Bassin du Lúrio. Ce projet implique l’installation d’une ferme énorme le long du Lúrio, à l’intersection des provinces de Niassa, Nampula et Cabo Delgado. Le projet, qui se monte à 4,2 milliards de dollars, est sous la supervision de l’entreprise Companhia de Desenvolvimento do Vale do Rio Lúrio [société de développement de la vallée du Lúrio] qui semble être gérée par TurConsult Ltda. TurConsult appartient à Rui Monteiro, un grand homme d’affaires de l’industrie hôtelière et touristique mozambicaine, et Agricane, une entreprise sud-africaine qui a fourni des services de conseil et de gestion à beaucoup de grands projets agroalimentaires en Afrique, notamment dans l’industrie sucrière. On ne sait pas avec certitude qui est derrière le financement. L’entreprise prévoit de construire deux barrages hydroélectriques - un de 40 MW et un de 15 MW - sur le Lúrio et d’installer un système d’irrigation sur 160 000 ha ; elle entend aussi développer 140 000 ha supplémentaires, pour mettre en place une agriculture contractuelle, faire de l’agriculture pluviale et de l’élevage. Le projet se concentrerait sur une production destinée à l’exportation : coton, maïs, céréales et bétail, ainsi que de la canne à sucre pour l’éthanol. Selon les premières estimations, le projet pourrait affecter jusqu’à 500 000 personnes vivant dans la région. Comme dans le projet ProSavana, le public n’a pas accès aux détails : on sait seulement par des sources anonymes que le projet a déjà été présenté au ministère de l’Agriculture pour y être analysé et qu’il est censé être approuvé par le Conseil des ministres, comme le veut la législation concernant les projets de cette envergure. Le projet du Lúrio et celui de ProSavana ne doivent pas être dissociés. Ils relèvent tous deux d’un mouvement plus large auquel participent la Banque mondiale et la Nouvelle Alliance du G8 pour la sécurité alimentaire et la nutrition, et dont le but est d’ouvrir le Mozambique aux grands projets d’agrobusiness. La Nouvelle Alliance du G8 a été proposée par le gouvernement américain et signée par 40 États, des institutions financières internationales et des organisations multilatérales au Sommet du G8 qui s’est tenu en 2009 à L’Aquila, en Italie.3 Avec cette Nouvelle Alliance, un accord-cadre a été signé avec le Mozambique et a donné naissance à une politique nationale, le Plan national d’investissement dans le secteur agricole (PNISA), qui est devenu la référence pour le développement agricole en Mozambique. Le PNISA était censé répondre aux priorités des Mozambicains en mettant en pratique la Stratégie pour le développement du secteur agricole (PEDSA) récemment formulée par le pays. Mais à cause de l’accord-cadre de la Nouvelle Alliance, le PNISA sert principalement les intérêts des grandes puissances mondiales, en particulier les pays du G8 et leurs entreprises respectives, sous le prétexte de renforcer la « sécurité alimentaire et la nutrition » au Mozambique.4 Pour respecter les termes de son accord-cadre, le gouvernement mozambicain a déjà mis en place d’importantes réformes facilitant les investissements dans l’agrobusiness. Il s’agit par exemple de changements dans la législation foncière pour permettre d’allouer de manière plus flexible les titres de propriétés, qu’on appelle les “droits d’usage et d’exploitation de la terre” [DUAT, acronyme portugais]. Des changements aussi dans la législation concernant les semences et les engrais, pour l’harmoniser avec celle de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC). Ces réformes sont importantes parce qu’elles ouvrent la porte à de gigantesques projets agroalimentaires dans le couloir de Nacala.5 Le Plan stratégique pour le couloir de Nacala exacerbe encore la course aux terres dans la région. Ce plan réunit plusieurs investissements majeurs dans le secteur des infrastructures, de l’extraction des ressources, des mines et des transports. La carte ci-dessous illustre le réseau des investissements (mines, agrobusiness et transport) dans le couloir de Nacala et montre comment ceux-ci sont reliés à d’autres couloirs de transport régionaux, grâce à la remise en état d’une ligne de chemin de fer de 912 km reliant la ville productrice de charbon de Moatiza au port de Nacala. Le Plan stratégique est financé par l’Agence de coopération internationale du Japon (JICA). L’entreprise japonaise Mitsui est l’un des principaux investisseurs de la mine de charbon de Moatiza, de la ligne de chemin de fer et du port de Nacala ; elle est également un investisseur potentiel dans la production agricole de la région.6 Les gouvernements, les entreprises et les agences qui promeuvent ProSavana et les autres projets concernant le couloir de Nacala soutiennent que les agriculteurs locaux vont pouvoir profiter des nouveaux investissements et infrastructures et de l’accès aux marchés. Ils affirment aussi que les paysans ne seront pas déplacés de leurs terres pour laisser la place aux grandes exploitations agricoles. Toutefois, il est clair que ces projets servent déjà d’incitation à l’accaparement des terres dans le couloir de Nacala. Plusieurs entreprises étrangères, quelquefois en collaboration avec des entreprises locales liées à des membres du Front de libération du Mozambique [le FRELIMO, parti au pouvoir au Mozambique], ont déjà réussi à acquérir de vastes parcelles de terres agricoles dans la région et déplacé des centaines de familles paysannes. Les sommes énormes investies aujourd’hui dans le couloir de Nacala pour la réalisation des projets d’agrobusiness recréent essentiellement les conditions qu’a déjà connues la population locale sous le colonialisme portugais, quand l’administration allouait généreusement les terres les plus fertiles aux investisseurs portugais. À cette époque, les Mozambicains qui travaillaient ces terres reçurent un peu d’argent en compensation, mais la plupart furent tout simplement chassés de chez eux. En 1975, l’Indépendance a fait fuir les investisseurs portugais et les gens sont retournés sur leurs terres qu’ils ont recommencé à cultiver. Dans certains cas, des entreprises d’État ont repris les plantations coloniales, mais peu d’entre elles ont été à même d’assurer la poursuite de la production et les communautés ont par la suite récupéré une grande partie de ces terres. La législation foncière du Mozambique accorde aux communautés la possession des terres qu’elles ont cultivées pendant plus de dix ans. Les anciens domaines coloniaux auraient donc dû revenir officiellement aux agriculteurs locaux. Mais comme la région est redevenue une cible pour les investisseurs étrangers en agriculture, le gouvernement mozambicain, de connivence avec les investisseurs étrangers, leur accorde des baux à long terme sur les terres en question. Ce relent de colonialisme est encore renforcé par le fait que certains de ces investisseurs sont des familles portugaises qui s’étaient enrichies pendant la période coloniale et reviennent aujourd’hui au Mozambique pour y installer des plantations, précisément sur les terres fuies par les colons portugais il y a 40 ans. Peu d’entre elles ont des compétences en agriculture, mais beaucoup ont des contacts avec des membres influents du FRELIMO, qui les aident à acquérir des terres et à réprimer toute velléité d’opposition émanant des communautés locales. Souvent les communautés ne savent même pas qui accapare leurs terres. Les entreprises qui prennent possession de leurs terres sont généralement enregistrées dans des paradis fiscaux offshore, comme Maurice, où l’identité des propriétaires et les registres financiers sont sous le sceau du secret. Ce qui laisse aux autorités mozambicaines et aux communautés affectées peu de possibilités pour demander des comptes à ces entreprises ou s’assurer qu’un minimum de bénéfices restent dans le pays. Le présent rapport se fonde sur des articles publiés, des documents officiels, des entretiens et des rapports de terrain. Il fournit des informations détaillées sur des cas d’accaparement des terres pour la production agricole qui ont déjà effectivement eu lieu dans le couloir de Nacala. Il expose certains des acteurs clés et montre comment les investisseurs étrangers et leur modèle industriel d’agrobusiness sont un désastre pour les communautés paysannes locales et leurs systèmes alimentaires. Ces cas d’accaparement des terres donnent une idée claire du genre d’“investissement” qui attend les paysans mozambicains affectés par le projet ProSavana, celui du Lúrio et les autres initiatives destinées à encourager l’investissement étranger en matière d’agrobusiness. Le retour du colonialisme portugais Mozaco et le Grupo Espirito Santo La Mozambique Agricultural Corporation (Mozaco) a été créée au Mozambique en juin 2013 par Rioforte Investments et João Ferreira dos Santos (JFS Holding). Mozaco affirme avoir acquis en juin 2013 un DUAT couvrant 2 389 ha près du village de Natuto, dans le district de Malema de la province de Nampula, et avoir l’intention d’y cultiver du soja et du coton. Selon l’entreprise, son « objectif est d’étendre [l’exploitation] pour atteindre une superficie de 20 000 ha ». Elle prévoit aussi d’engager entre 116 et 170 agriculteurs locaux dans un système de production contractuelle sur 83 ha, en s’appuyant sur un programme développé avec l’ONG américaine Technoserve.7 La zone occupée par Mozaco dans la communauté de Natuto, dans la subdivision administrative de Canhunha, dans le district de Malema, est une région qui, au temps du colonialisme, fut occupée par un colon du nom de Morgado, qui cultivait du tabac et du coton sur un millier d’hectares. Après l’Indépendance, le gouvernement a nationalisé les terres et installé une entreprise d’État, l’Unidade de Namele, qui exploitait également des fermes dans les districts de Ribaué et de Laulaua. À son apogée, la ferme d’État a employé jusqu’à 5 000 ouvriers, mais en 1989, suite à l’intensification de la guerre civile, elle a été fermée. « Quand l’entreprise a fermé, les ouvriers en étaient à plusieurs années de salaires impayés, » rappelle un père de sept enfants originaire de Natuto, qui a travaillé à la ferme d’Unidade de Namele. « Mais comme il était impossible de se plaindre, vu le niveau de répression gouvernementale à l’époque, beaucoup d’entre nous ont fini par s’approprier de petites parcelles de la ferme d’État, entre un et cinq hectares, que nous avons continué à cultiver jusqu’à aujourd’hui. L’entreprise João Fereira dos Santos a cultivé quelques hectares de tabac de Virginie jusqu’au début des années 1990, mais elle a laissé tomber cette activité depuis des années. »8 La législation foncière mozambicaine stipule que les familles qui occupent et cultivent des terres depuis plus d’une décennie, comme c’est le cas des familles qui cultivent les terres de l’ancienne ferme de l’Unidade de Namele, sont censées obtenir des DUAT qui empêchent toute entreprise ou agence publique de les chasser de leurs terres, sauf pour raison évidente d’intérêt public, comme la construction d’un hôpital, d’une école ou d’une route principale. Or selon les leaders paysans locaux, Mozaco a déjà expulsé 1 500 agriculteurs pour faire place nette pour leurs activités. L’association ADECRU [une association importante d’étudiants et de jeunes Mozambicains] prévoit que plusieurs milliers de plus vont perdre leurs terres si on laisse l’entreprise s’étendre sur 20 000 ha.9 L’accès à la terre n’est d’ailleurs qu’une partie de l’enjeu pour les communautés : il ne fait aucun doute que Mozaco a choisi la région parce qu’elle est située entre deux rivières importantes, la Malema et la Nataleia, où 4 500 familles vivent de l’agriculture. Ces familles risquent maintenant de perdre l’accès non seulement à leurs terres, mais aussi à l’eau dont ils dépendent pour leurs cultures et leur survie. Durant la saison 2012-2013, Mozaco a cultivé du soja sur quelque 200 ha. À la seconde saison, l’entreprise s’est étendue sur 400 ha. Dix familles ont ainsi perdu leur maison et reçu une compensation allant de 3 000 à 10 000 Mt [meticals], soit de 90 à 300 dollars. L’église locale de Santa Lucia a également été détruite et 1 500 agriculteurs se sont vus priver d’accéder aux terres comprises dans cette zone, sans compensation aucune ; cette situation constitue une violation flagrante de la législation foncière.10 JFS Holding appartient à 100 % à la famille portugaise Ferreira dos Santos. La famille est impliquée depuis très longtemps dans l’agriculture au Mozambique et JFS est aujourd’hui le plus gros producteur de coton du pays. Mais le propriétaire majoritaire de Mozaco est Rioforte Investments, qui détient 60 % des actions de l’entreprise.11 Rioforte, dont le siège est au Luxembourg, a été créé en 2009 pour regrouper les actifs non financiers du Grupo Espirito Santo – une dynastie financière portugaise qui jouit de connections politiques importantes et qui est actuellement mêlée à ce qui est peut-être le pire scandale économique de l’histoire du Portugal. En mai 2014, la Banque du Portugal a ordonné un audit qui mettait en cause la stabilité financière et la transparence de la Banco Espirito Santo, la principale entité du Grupo Espirito Santo. Cet audit a été suivi en août par le sauvetage controversé de la Banco Espirito Santo, qui s’est monté à 4,5 milliards d’euros, avec la bénédiction de l’UE. Dans le cadre du plan de sauvetage, la Banco Espirito Santo a été divisée en deux banques : l’une constituée d’actifs “sains” et l’autre d’actifs “toxiques”. Ces actifs toxiques étaient principalement les investissements de la banque dans les entités pour la plupart non soumises à réglementation et vérification du Grupo Espirito Santo. Des enquêteurs d’au moins six pays - le Portugal, la Suisse, le Venezuela, le Panama, le Luxembourg et l’Angola – auraient examiné les documents, transferts et transactions de la banque, pour tenter de déterminer quelles astuces le Grupo Espirito Santo avait bien pu utiliser pour se maintenir à flot.12 Il semble que les actifs de Rioforte, y compris ses fermes, aient été abandonnés dans la pile considérée comme “toxique”. Outre son exploitation agricole Mozaco au Mozambique, Rioforte possède trois exploitations de soja et d’élevage de bétail au Paraguay sur 135 000 ha, par le biais de sa filiale, la Paraguay Agricultural Corporation (Payco), et trois exploitations d’eucalyptus et de cultures alimentaires au Brésil sur 32 000 ha, à travers deux autres filiales.13 On ne sait pas vraiment ce qui va arriver à Mozaco et aux autres fermes de Rioforte. En juillet 2014, Rioforte Investments, avec près de 3 milliards d’euros de dettes, demandait la protection des créanciers dans un tribunal du Luxembourg. La requête a été accordée. Mais en octobre 2014, la Cour commerciale du Luxembourg a renversé la décision et stipulé que la filiale devait être liquidée et les fonds résultant de l’opération utilisés pour payer les créanciers. Les tentatives d’appel du Grupo Espírito Santo n’ont pas abouti. La Banco Espirito Santo détient également 49 % de la Moza Banco, la quatrième banque privée du Mozambique. On ne sait ce que l’effondrement de l’empire Espirito Santo va signifier pour cette banque qui appartient pour 51 % à des investisseurs mozambicains ; à leur tête se trouve l’ancien gouverneur de la Banque du Mozambique, Prakash Ratilal, et l’ancien Président Guebuza y détiendrait apparemment une participation.14 Alfa Agricultura Lda 15 Alfa Agricultura Limitada appartient à l’homme d’affaires sud-africain Jan Paulus Le Grange. Le Grange est spécialisé dans le forage et les services de distribution d’eau autour du port de Nacala, mais il a commencé récemment à s’intéresser à l’agriculture.16 Le Grange prévoit de mettre en place une grande entreprise de volaille et il d’abord acquis des terres pour pouvoir produire du soja pour nourrir ses volailles et pour l’exportation.17 Ses opérations agricoles ont droit à une subvention de 2,6 millions de meticais [77,000 dollars] de l’USAID et du gouvernement mozambicain, dans le cadre de leur projet commun FIN Agro.18 Alfa Agricultura a d’abord acquis un DUAT de 1 000 ha dans le district de Monapo, dans la province de Nampula, en 2013. La plupart des terres concernées font partie d’un ancien domaine colonial portugais que les paysans du village de Nacololo ont occupé après l’Indépendance du pays en 1975. Selon la législation foncière mozambicaine, ces terres auraient déjà dues être rendues aux communautés, puisque celles-ci les occupaient et les cultivaient depuis plus de 10 ans. Certains des paysans locaux avaient même obtenu des DUAT pour une partie de la ferme. Cependant, une fois obtenu le DUAT, Alfa Agriculture a immédiatement pris possession des terres et expulsé les paysans, installé une clôture tout autour et commencé à planter du soja.19 Alfa Agricultura serait également en train de chercher à acquérir des terres dans la communauté voisine de Vida Nova, située aussi dans le district de Monapo. Là encore, Alfa Agricultura a essayé de se faire attribuer les droits concernant deux anciennes fermes coloniales d’environ 2 000 ha. Les paysans locaux avaient été expulsés de ces fermes durant la période coloniale pour faire la place aux concessions allouées à deux Portugais, Manuel Logrado et Manuel dos Santos. Suite à l’Indépendance en 1975, ces terres ont été récupérées et cultivées à nouveau par la population locale de Vida Nova et les communautés avoisinantes de Micolene, Numacopa et Napepele. Pour la population locale, les prétentions d’Alfa Agricultura sont fondées sur un accord avec le chef du village voisin de Merutu, accord qui a été signé après une seule journée de rencontre avec l’entreprise. Les gens estiment que ce chef n’a aucune autorité sur leurs terres ancestrales et refusent de reconnaître l’accord.20 AgroMoz Le profil de l’entreprise AgroMoz en dit long sur ce qui se trame actuellement dans le couloir de Nacala. Cette entreprise, un partenariat qui implique l’homme le plus riche du Portugal, l’ancien Président de Mozambique et l’un des plus grands propriétaires terriens du Brésil, s’est installée au cœur de la zone de production de soja. En 2012, des représentants d’AgroMoz sont arrivés dans la subdivision de Lioma, ont obtenu à la hâte de certains services gouvernementaux des droits fonciers et ont entrepris de chasser de leurs terres plus d’un millier de paysans du village de Wakhua.21 « L’opération a débuté en 2012 et à l’époque, on nous a dit que le projet AgroMoz ne concernerait initialement qu’une zone estimée à quelque 200 hectares avec une parcelle pour tester la productivité de plusieurs variétés de semences comme du soja, du maïs et des haricots, » rappelle Agostinho Mocernea, secrétaire du village de Nakarari. Mais l’entreprise n’a pas tardé à poursuivre son expansion. 22 Pendant la saison 2013-2014, AgroMoz a cultivé 2 100 ha, dont 1 700 en soja et 400 en riz. Mais l’entreprise ne cache pas son intention d’atteindre 12 000 ha.23 Les agriculteurs expulsés ont reçu une compensation minime, de l’ordre de 2 000 à 6 500 Mt (65 à 200 dollars). L’un d’entre eux, Fernando Quinakhala, père de cinq enfants, raconte qu’Agromoz l’a chassé d’une parcelle de 3,5 ha que ses ancêtres cultivaient déjà. L’entreprise a décidé qu’il avait droit à une compensation de 6 500 Mt, mais pour Quinakhala, cette compensation était très loin de la valeur que représentait sa terre, à ses yeux et à ceux de sa famille. « Je n’ai même pas pris l’argent, parce que ça ne voulait rien dire, » explique-t-il. 24 Selon un autre agriculteur de Wakhua, Mariana Narocori, mère de trois enfants, quand la procédure d’allocation des terres a commencé, elle a été convoquée pour participer à une réunion annoncée par le chef local ; c’est là qu’il a été dit que les terres seraient données à AgroMoz.25 « J’ai été obligée de signer un document dont je ne connaissais pas le contenu et je n’ai reçu que 4 500 Mt (155 dollars), » indique Mme Narocori. « Une semaine plus tard, un bulldozer est arrivé et a démoli ma maison et détruit les récoltes. Je me suis retrouvée sans domicile et j’ai dû partir à la ville de Nakarari où on m’a alloué une parcelle sur laquelle j’étais censée bâtir ma maison et installer une ferme pour survivre. »26 Cette histoire montre comment le déplacement des habitants de Wakhua ajoute à la pression foncière dans d’autres endroits et multiplie encore les risques de conflits fonciers. AgroMoz n’a toujours pas rempli la promesse faite à la communauté de construire une clinique et une école. Cependant, la santé de la population locale est déjà sévèrement affectée par les activités de l’entreprise : au cours de la dernière saison, l’entreprise a en effet commencé à faire des épandages aériens de pesticides sur ses champs de soja. « Durant la saison agricole 2013-2014, un groupe d’ouvriers d’agroMoz est venu nous dire que pendant l’épandage, qui était fait à partir d’un petit avion, les gens avaient dû quitter leur maison pour éviter les effets néfastes des produits chimiques, » indique Mocernea. Quelques jours après, tous les habitants ont commencé à souffrir de la grippe et leurs récoltes sont mortes ».27 Malgré l’opposition de la population locale et les effets destructeurs de l’entreprise jusqu’alors, le gouvernement mozambicain a accordé à AgroMoz un DUAT pour 9 000 ha à Lioma. À cette date, Armando Guebuza, l’un des investisseurs d’AgroMoz, était encore Président du pays. AgroMoz serait une joint-venture entre le groupe portugais Grupo Américo Amorim, une holding appartenant à l’homme le plus riche du Portugal, Américo Amorim, et Intelec, une société décrite par l’ambassade américaine comme « un véhicule d’investissement pour le Président Guebuza. »28 C’est le Pinesso Group, une société brésilienne exploitant des fermes sur plus de 180 000 ha au Brésil et 22 000 ha au Soudan, qui gère les opérations agricoles, mais on ne sait si le groupe détient également une participation dans AgroMoz. Des informations glanées dans les registres de la société et sur les sites Internet d’employés suggèrent qu’AgroMoz fait en réalité partie d’AGS Moçambique, SA., une entreprise mozambicaine appartenant à deux filiales portugaises du Grupo Amorim (Solfim SGPS et Sotomar - Empreendimentos Industriais e Imobiliários, S.A.) et à ESF Participaçoes, une filiale d’ESF Investimentos, détenue par Intelec et SF Holdings, entreprises dirigées tous les deux par le principal partenaire d’affaires de Guebuza, Salimo Abdula. Pour l’amour de Dieu « Quand les missionnaires sont arrivés, les Africains avaient la terre et les missionnaires la Bible. Ils nous ont appris à prier en fermant les yeux. Quand nous les avons rouverts, c’est eux qui avaient la terre et nous, la Bible. » – Jomo Kenyatta Nouveaux horizons L’une des grandes idées évoquées pour le couloir de Nacala est d’en faire une région majeure de production de volaille. Diverses entreprises et des projets financés par des donateurs ont tenté, de diverses manières, de développer dans la région un modèle d’élevage contractuel à l’américaine et la culture de plantes adaptées à l’alimentation animale, notamment le soja. L’un des premiers projets envisagés fut mené par un agriculteur et missionnaire du Zimbabwe, Andrew Cunningham, qui installa un couvoir et une usine d’alimentation animale, New Horizons Mozambique, en 2005, sur une superficie de 300 ha, à 15 km à l’ouest de Nampula City, avec le soutien de l’ONG américaine Technoserve, puis de l’IFC de la Banque mondiale.29 « Nous sommes les Fous de Dieu, car nous faisons des affaires et cultivons la terre à Sa manière, » déclare Cunningham. En 2007, New Horizons Mozambique a été racheté par Cazz Services Ltd, qui semble être enregistré aux Îles Vierges britanniques, et par le J.K. Trust, une société inconnue.30 Puis en 2011, la société américaine New Horizons Africa LLC a pris une participation de 33 % dans l’entreprise. New Horizons Africa LLC appartient à une famille de l’Arkansas, les Ron Cameron, qui détiennent également la Mountaire Corp, le n° 6 de la volaille aux États-Unis et l’un des principaux soutiens financiers du Parti républicain.31 New Horizons n’a pas été mise en place simplement pour faire des affaires, mais aussi pour « étendre le Royaume de Dieu dans les campagnes d’Afrique. » L’entreprise, travaillant en étroite collaboration avec l’église évangélique Newfrontiers du Zimbabwe, construit ce qu’elle appelle une « communauté de fusion » dans la région, un concept intégrant les activités volaillères, les écoles religieuses et les églises. L’une des entreprises qui a rejoint cette « communauté » en 2011 est le Center Fresh Group – deuxième producteur d’œufs américain, qui élève quelque 25 millions de poules en permanence dans ses fermes.32 Par le biais de la joint-venture entre Mozambique Fresh Eggs, New Horizons et Eggs for Africa, une autre entreprise de volaille de la « communauté » gérée par l’Église Newfrontiers, Center Fresh met en place et exploite des unités de production d’œufs à grande échelle. « La terre est très bonne. Mais les gens n’ont pas les savoir-faire nécessaires. Je pense que c’est dans cette région qu’on va voir le prochain grand boom de l’agriculture, » affirme le partenaire du Center Fresh Group, Bruce Dooyema. Rei do Agro Les bailleurs de New Horizons et de ses filiales affirment que leur priorité est de créer des opportunités pour la population locale. Pourtant le plan économique de Mozambique Fresh Eggs fait appel à un partenariat avec une autre entreprise américaine pour établir dans la région une grande exploitation agricole destinée à la production de plantes fourragères pour ses volailles.33 Dans un souci de faire de leur investissement au Mozambique une réussite, les propriétaires du Center Fresh Group ont fait venir Jes Tarp et Paul Larsen à Nampula, pour voir si ces derniers pourraient installer des exploitations agricoles analogues à celles qu’ils avaient mises en place en Ukraine. L’entreprise de Tarp et Larsen, Aslan Global Management, avait déjà levé des fonds aux États-Unis pour acquérir et exploiter 10 000 ha en Ukraine. Par le biais de sa filiale mozambicaine Rei Do Agro, Aslan a obtenu du gouvernement mozambicain un DUAT pour 2 500 ha à Gurúè, en Zambézie, à environ 130 km à l’ouest des fermes volaillères de New horizons, « avec promesse de 10 000 ha supplémentaires » ; Aslan a racheté également un élevage de bétail de 42 000 ha à Morogoro, en Tanzanie. Ces deux acquisitions sont à l’épicentre des conflits fonciers entre les investisseurs étrangers et les populations locales. Aslan Global Management est financé par une cinquantaine d’Américains qui ont investi chacun environ 100 000 dollars dans l’entreprise.34 « Il y a des agriculteurs, il y a des docteurs, il y a des agents d’assurance. Des gens de tous les milieux, » indique Tarp.35 Les fonds émanant de ces Américains “ordinaires” passent dans Aslan Global et Rei do Agro en suivant tout un réseau complexe de sociétés situées dans des territoires offshore et des pays à la fiscalité attrayante, depuis Maurice jusqu’à l’État américain du Delaware.36 Ces sociétés sont liées à de nombreuses autres sociétés gérées par Tarp, Larsen et /ou leur associé d’affaires Quentin Silic. Toutes sont enregistrées à la même adresse à Naples, en Floride. Tarp est un ancien pasteur évangélique danois et Larsen un directeur financier au passé douteux, très impliqué dans les nouveaux montages financiers liés à l’église. Larsen et Silic ont été exclus définitivement du secteur américain des valeurs mobilières par l’Autorité de régulation du secteur financier (FINRA) en 2011. Cette sanction est intervenue après les 15 procédures de divulgation d’informations (disclosure events) accumulées par Paul Larsen en l’espace de 4 ans, correspondant à des millions de dollars de pertes réclamées par ses clients.37 Une procédure de divulgation d’informations peut-être une mesure réglementaire, une sanction, un procès, une plainte de client, une condamnation criminelle ou une clôture d’instruction. Larsen se serait attaqué à des retraités et aurait exploité des connexions religieuses pour gagner leur confiance. Dans un des cas, Larsen a convaincu un couple de retraités de retirer les économies destinées à leur retraite et les a utilisées pour des investissements alternatifs risqués où leur argent a fini par perdre beaucoup de sa valeur. Larsen a aussi omis de déclarer ses liens d’intérêt avec les sociétés dans lesquelles il investissait l’épargne de ses clients.38 Une demande d’arbitrage de FINRA allègue des dommages de plus de 2 millions de dollars liés à la vente d’investissements dans des fonds et des sociétés risquées, notamment l’UKAG Group LLC, dont Tarp, Larsen et Silic se sont servis pour financer leurs opérations agricoles en Ukraine.39 Tout cela n’a pas empêché Rei do Agro de recevoir un généreux financement des agences de développement européennes. Les activités agricoles de la compagnie en 2013-2014 ont été financées par AgDevCo, une entreprise britannique soutenue par les gouvernements du Royaume-Uni, des Pays-Bas et de la Norvège ; Rei do Agro a également reçu une aide financière du programme ProParcerias lui-même financé par l’UE, le FIDA et la FAO.40 Les entreprises mozambicaines Fresh Eggs et New Horizons sont elles aussi financées par des agences de développement européennes, par l’intermédiaire de l’African Enterprise Challenge Fund [Fonds d’appui africain pour le développement des entreprises], qui est sous l’égide de l’AGRA et financé par le Département britannique pour le développement international (DfID), SIDA (agence suédoise de coopération internationale pour le développement) et AusAid (programme d’aide étrangère de l’Australie).41 « Le problème de l’Afrique dans l’ensemble, c’est que l’économie n’existe pas, » déplore Wallie Hardie, un agriculteur américain qui siège au conseil d’administration de l’Aslan Group et fournit des services de conseil à Rei do Agro. « La raison pour laquelle l’économie n’existe pas, c’est que, il y a 20 ans, la plupart de ces pays étaient occupés par les Communistes et donc ils ne comprennent pas vraiment le modèle du profit. Ils n’ont vraiment aucune idée de ce qu’est le capitalisme. »42 Des capitaines d’industrie Corredor Agro Corredor Agro est une entreprise mozambicaine contrôlée par deux riches familles européennes : les Von Pezold, une famille allemande et autrichienne et la dynastie norvégienne du transport maritime, la famille Høegh. L’entreprise a récemment installé deux fermes à Nampula : la ferme de Meserepane sur 2 200 ha, qui fait de grandes cultures et celle de Metocheria sur 6 000 ha, qui cultive des bananes. Elle poursuit aussi des programmes de production contractuelle, en particulier pour la production de manioc en partenariat avec le brasseur SABMiller. Les ouvriers de l’entreprise se sont mis en grève en juillet 2010 pour réclamer de meilleurs salaires, un accès aux soins médicaux, la fin des expulsions non justifiées et l’exclusion de certains membres du conseil d’administration. Le gouvernement mozambicain a finalement imposé une amende de 200 000 dollars à l’entreprise pour violation de la législation mozambicaine du travail. Les communautés locales sont également en colère à propos des terres acquises par l’entreprise. Selon la communauté de Metocheria, les consultations concernant les terres n’ont pas été menées correctement, l’information a été insuffisante et de fausses promesses ont été faites. « Matanuska est venu pour tromper et nuire aux gens : il a pris toutes nos terres fertiles, a limité l’accès au Monapo et maintenant, on voit beaucoup de pauvreté et de plus en plus de gens ont faim, » indique un habitant. « Matanuska s’est joué de nous en nous disant qu’il augmenterait les revenus de la population et améliorerait nos conditions de vie. L’homme qui est venu discuter avec les communautés et les gens a distribué des biscuits et la communauté a accepté le projet parce qu’elle espérait des emplois et d’autres avantages, » raconte un autre habitant.43 Corredor Agro est une joint-venture entre Rift Valley Holdings, une entreprise enregistrée à Maurice et appartenant aux familles Von Pezold et Høegh, qui a la main sur 400 000 ha de terres agricoles en Afrique, et Matanuska Mauritius Limited, pour qui on ne dispose d’aucune information publique.44 La plantation de bananes de la ferme de Metocheria appartient en partie à Norfund. Chiquita, l’un des plus grands producteurs mondiaux de bananes, était lui aussi impliqué au départ dans la plantation. Un câble, venant de l’Ambassade américaine au Mozambique et publié par Wikileaks, révèle que Chiquita a décidé qu’il valait mieux pour l’entreprise qu’elle poursuive son expansion dans la production de bananes en Afrique de façon indirecte, par le biais de simples partenariats avec d’autres entreprises, plutôt que d’établir ses propres plantations.45 « Chiquita a pris la décision stratégique de ne pas investir en Afrique de la même façon qu’il l’avait fait en Amérique latine. L’entreprise ne va pas investir directement dans la terre ou les cultures, mais établira des partenariats avec un investisseur local chargé d’acheter ou de louer les terres, » peut-on lire dans le câble de l’Ambassade américaine. D’autres documents montrent que Chiquita a supervisé et dirigé la sélection des terres pour la plantation de bananes. Mais en 2010, Chiquita a décidé d’abandonner le Mozambique, sous prétexte que la qualité des bananes était insuffisante et que la piraterie au large du Mozambique rendait le transport des cargaisons destinées aux pays du Nord trop risqué. En janvier 2014, Matanuska a mis en place un partenariat avec la société américaine Dole Foods qui donne à Dole le statut de distributeur unique pour les bananes de Matanuska, en Afrique, en Europe et au Moyen-Orient.46 En février 2013, Matanuska a fait état d’une attaque de maladie de Panama (souche FOC TR4) dans sa ferme ; la plus grande part de la récolte a été détruite depuis par la maladie. Les chercheurs ne savent pas très bien comment ce champignon, qui a provoqué des désastres dans les plantations de bananes et les petites exploitations dans toute l’Asie, est arrivée jusqu’à la ferme de Matanuska. Pour certains, il aurait été importé par un employé venu des Philippines. C’est la première occurrence en Afrique de cette maladie létale qui touche les bananes et le risque de dissémination de la maladie dans d’autres régions du Mozambique et dans toute l’Afrique est indéniable.47 Hoyo Hoyo Hoyo Hoyo est une entreprise mozambicaine, créée par Quifel Resources, un conglomérat portugais aux mains de l’aristocrate Miguel Pais do Amaral, qui est aussi un professionnel de la course automobile. L’entreprise dispose de deux DUAT : 20 000 ha en Zambézie et 8 000 dans la province de Tete. En Zambézie, Hoyo Hoyo a démarré sur une ancienne ferme d’État autour du village de Ruace, dans le district de Gurúè. Ces terres avaient été réoccupées par la population locale après l’Indépendance en 1975. Une enquête de 2012 a montré que 836 agriculteurs cultivaient 1 945 ha des 3 500 que Hoyo Hoyo avait l’intention d’exploiter. Hoyo Hoyo a alors promis aux gens qu’il leur verserait une compensation et préparerait de nouvelles terres en vue de leur réinstallation, mais ces projets ne se sont pas matérialisés. « J’ai été chassée de la terre que j’avais héritée de mes parents, avec la promesse de nouvelles terres à cultiver et d’une compensation de 68 dollars. Depuis mon expulsion il y a un an, tout ce que j’ai reçu c’est un quart de la somme promise et je n’ai aucune information sur la nouvelle parcelle que je dois pouvoir cultiver, » déplore Delfina Sidónio, une mère de trois enfants qui a été chassée de ses terres par Hoyo Hoyo. « Cette terre représentait toute notre vie. Cette terre nous fournissait de la nourriture et ce dont nous avions besoin – c’était toute notre vie, » explique Ernestos Elias, qui dirige l’association des petits producteurs de Ruace. « Les dernières récoltes sont presque terminées dans nos réserves et nous ne savons pas comment nous allons survivre après les deux prochains mois, » s’inquiète une autre petite productrice, Fatima José, qui a été privée de ses terres par l’entreprise. Les concessions foncières ont été accordées à Quifel Natural Resources Moçambique, Lda., une filiale de l’entreprise portugaise Quifel Natural Resources SA en décembre 2009.48 Mais juste avant que le Conseil des ministres n’approuve l’allocation d’une concession de 10 000 ha à Quifel, 20 % de l’entreprise ont été rachetés par Lioma Agricultura e Projectos de Gestao, Lda, une société contrôlée par deux personnes jouissant de contacts au plus haut niveau de la classe politique, l’avocat portugais Francisco Xavier Vaz de Almada de Avillez et l’homme d’affaires mozambicain Armando Jeque.49 La compagnie a connu des difficultés pendant 2-3 ans. Les gens ont été expulsés de leurs terres mais quasiment aucun investissement n’a été réalisé dans la production. Puis en janvier 2012, Quifel Natural Resources SA a vendu ses parts à une société enregistrée à Maurice, Hoyo One Ltd.50 Il semblerait que Hoyo One Ltd appartienne au BXR Group, une société néerlandaise, par le biais de sa filiale néerlandaise Hoyo Hoyo B.V. Le groupe BXR appartient au milliardaire tchèque Zdenek Bakala et à des "trusts" associés à la banque Crédit Suisse. BXR a récemment commencé à investir lourdement dans les terres agricoles : 60 000 ha en Argentine, 12 000 au Brésil et 1 000 au Malawi. Les nouveaux financiers agricoles Regional Development Company Ltd En 2009, le gouvernement mauricien établit la Société de développement régional (RDC) pour réaliser des investissements en Mozambique, tout particulièrement dans le secteur de la production alimentaire. Dans le cadre d’un premier accord avec le gouvernement du Mozambique, la RDC obtient un DUAT de 5 000 ha dans la province de Manica et un autre de 18 500 ha dans la province de Maputo ; les deux DUAT sont valables pendant 49 ans et ont été accordés par la Regional Development Company (Moçambique) Limitada, une entreprise mozambicaine établie en 2010 et appartenant en totalité au ministère mauricien des Affaires étrangères.51 La RDC affirme servir d’"interface" entre les investisseurs et le gouvernement mozambicain. Elle identifie les investisseurs, négocie avec eux, puis leur alloue des terres faisant partie de ses concessions de DUAT sous la forme d’une “ allocation d’accord de développement foncier”. Les investisseurs versent à la RDC une somme annuelle pour ses services. L’une des règles de l’accord est que les investisseurs doivent proposer 25 % de leur production sur la base du droit de premier refus à chacun des gouvernements (Mozambique et Maurice).52 Les investisseurs avec qui la RDC a jusqu’à présent engagé des négociations pour l’exploitation des terres de Maputo et Manica sont les suivants : • British American Investment Co. Ltd (Maurice), un des principaux actionnaires de l’Equity Bank de Nairobi, qui est en phase d’installation d’une plantation de maïs et de soja sur 6 000 ha ; • La Compagnie des Trois Amis Ltd (Maurice), en partenariat avec deux sociétés indiennes, Supreme Agro Projects Ltd et Prama Consulting Services Ltd, sur une plantation de 4 000 ha de riz ; • Mozpeixe SA (Mozambique), qui appartient à Quantum Business Development Ltd et des partenaires sud-africains et mauriciens, et met actuellement en place un projet d’aquaculture ; • Nirmal Seeds Pvt Ltd (Inde) qui a un projet de production de riz sur 2 000 ha ; et • Sri Rajeswari Oil Traders (Inde), avec un projet de production d’oléagineux sur 4 000 ha. Au début de 2013, la RDC a lancé un nouvel appel à investisseurs pour un DUAT de 2 456 ha accordé à sa filiale mozambicaine, situé cette fois dans la subdivision de Canacué, dans le district de Monapo, dans la province de Nampula. Ces terres furent enlevées à la population locale sous l’administration portugaise et données au Portugais José Nunes da Cruz. Après l’Indépendance, des centaines de petits paysans locaux s’y sont réinstallés, comme le montre la carte satellite Google de la zone du DUAT/ des DUAT de la RDC. On ne sait pas si les terres de Canacué ont été allouées à un investisseur puisque l’information n’a pas été rendue publique. La date limite fixée aux entreprises pour déclarer si elles étaient intéressées était le 27 mai 2013. African Century Agriculture (ACA) ACA est le plus grand opérateur d’agriculture contractuelle de Gurúè, en Zambézie, avec ses 844 agriculteurs sous contrat sur 1 250 ha. Ces opérations d’agriculture contractuelle ont été largement soutenues par l’Agence suisse pour le développement et la coopération, à travers le projet InovAgro. Le projet comprend un arrangement d’agriculture contractuelle sur 3 ans avec les coopératives d’agriculteurs locaux qui produisent du soja pour la ferme volaillère d’ACA, King Frango ; dans le cadre de cet arrangement, les Suisses fournissent la micro finance et couvrent 50 % des coûts d’équipement et 70 % des coûts de fonctionnement (puis 50 % la deuxième année, et 30 % la troisième année). Mais les intentions d’ACA ne se limitent pas à l’agriculture contractuelle. Dans la même zone de Gurúè, ACA a obtenu un DUAT de 1 000 ha et commencé l’exploitation à grande échelle. Dans le même temps à Lichinga, l’entreprise a reçu un DUAT encore plus étendu - 3 800 ha - de terres faisant partie d’une ancienne ferme d’État. La gestion des opérations de Lichinga est assurée par une joint-venture du nom d’African Century Matama Limitada (AC Matama) qui appartient pour 20 % à la Fundaçao Malonda – une fondation dont les propriétaires sont le gouvernement mozambicain et l’Agence suédoise de coopération internationale au développement (SIDA).53 AC Matama reçoit également le soutien d’agences européennes de développement, avec un versement de 500 000 dollars pour 2014 venant d’AgDevCo, une société britannique financée entre autres par les gouvernements britannique, néerlandais et norvégien. La ferme de Lichinga a été établie dans la période qui a suivi l’Indépendance avec l’aide au développement chinoise, mais fut abandonnée durant la guerre civile et les terres ont été réoccupées par les agriculteurs locaux. Les conflits qui se sont déclarés dans les années 1990 quand le gouvernement a essayé, mais sans succès, de chasser les paysans pour laisser la place à des investisseurs sud-africains, perdurent aujourd’hui à cause des activités d’AC Matama.54 Sérgio Gouveia, président d’AC Matama, admet qu’en raison de problèmes non résolus avec les DUAT, la « guerre » avec les paysans sur la question des droits fonciers se poursuit à l’exploitation de Lichinga.55 African Century Agriculture Ltd est enregistré à Maurice et appartient à l’African Century Group –une société enregistrée à Maurice mais basée à Londres. Le nom des propriétaires n’est pas connu. L’African Century Group a été créé par Jonathan Chenevix-Trench, ancien président de Morgan Stanley, l’un des plus grands établissements financiers du monde. Le groupe a investi lourdement en Afrique dans les banques, l’industrie alimentaire, les infrastructures et l’immobilier, avec l’aide de Norfund. L’une de ses filiales, l’entreprise mauricienne African Century Foods Ltd, détient Frango King Limitada, l’un des plus grands producteurs industriels de volaille du Mozambique. Elle entend « devenir le n°1de l’agrobusiness de la volaille en Afrique subsaharienne, en s’emparant au maximum de la chaîne de valeur, de la ferme à l’assiette. » Chenevix-Trench fait également partie du conseil d’administration de l’entreprise mozambicaine Machangulo SA, mise en place pour construire une station de luxe de 80 000 ha sur la péninsule de Machangulo, avec le soutien financier du Prince Willem Alexandre des Pays-Bas.56 Le prince héritier est revenu sur son investissement en 2012, quand les médias ont parlé de corruption et rapporté la violente répression exercée sur les pêcheurs et les villageois locaux qui protestaient contre le projet.57 « Je crois passionnément à la nécessité d’introduire en Afrique un capitalisme digne de ce nom, » déclare Chenevix-Trench. Trigon Mozagri Trigon Capital est une entreprise basée en Estonie et détenue par un homme d’affaires finlandais, Joakim Johan Helenius, et un fonds finlandais d’investissement privé, Thominvest Oy.58 Sa filiale danoise Trigon Agri A/S a été établie pour lever des fonds destinés à l’acquisition de fermes en Europe de l’Est. En 2014, elle avait accumulé des terres agricoles d’une superficie d’environ 170 000 ha en Ukraine et en Russie, ainsi que des fermes laitières en Estonie. En 2013, Trigon Capital a lancé une nouvelle entreprise en Estonie, Trigon Mozagri Spv, dont Helenius et Jan Peter Ingman sont directeurs, afin d’investir dans des exploitations agricoles au Mozambique.59 « De nos jours, vous avez plus de chances de vous enrichir rapidement en Afrique qu’en Estonie, » fait remarquer Helenius.60 La première acquisition de son entreprise a été Mocotex LLC, une entreprise de coton opérant dans le district de Mocuba, dans la province de Zambézie. Trigon affirme que Mocotex a une ferme commerciale de 1 000 ha et a accès à un total de 18 000 ha de « terres arables de première qualité » faisant partie d’une ancienne ferme d’État. Selon une brochure publiée par Trigon, Trigon et ses investisseurs ont racheté 51 % de Mocotex, les 49 % restants demeurant aux mains de ses propriétaires sud-africains. Mocotex a été créé en 1997 par une institution du gouvernement sud-africain, l’Industrial Development Corporation (IDC), et une entreprise mystérieuse, Caravel – Development International Projects Inc (Caravel Development). En décembre 2009, l’IDC a vendu ses parts de Mocotex, soit 75 % de l’entreprise, pour 10 000 dollars ; 25 % des parts sont allées à Caravel et 50 % à une autre mystérieuse compagnie du nom d’Aristo Group Trading. Puis en avril 2013, l’Aristo Group a vendu 20 % de ses parts au sud-africain Graham Hewlett, qui, avec son frère John Hewlett, est impliqué depuis fort longtemps dans l’agriculture industrielle mozambicaine. 61 Graham Hewlett dirige aujourd’hui les opérations de Mocotex pour Trigon. Aucune information permettant de savoir le nom des propriétaires de Caravel Development ou de l’Aristo Group Trading n’a pu être trouvée.62 Notes 1 Article(en portugais) disponible sur http://www.bancomoc.mz/Files/CDI/RelatorioAnual2013.pdf. 2 Plus d’infos sur la Conférence triangulaire des Peuples (en portugais). 3 Selon le G8, ce programme devrait sortir 50 millions d’Africains, dont 3,1 millions de Mozambicains, de la pauvreté d’ici 2022. Dix pays africains ont à ce jour signé des accords-cadres selon les termes de Nouvelle Alliance : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, l’Éthiopie, le Ghana, le Malawi, le Mozambique, le Nigeria, le Sénégal et la Tanzanie. 4 Vunhanhe e Adriano (2014), Segurança Alimentar e Nutricional em Moçambique: um longo caminho por trilhar, artigo ainda publicado. 5 Idem. 6 Sur le site internet (en anglais) de Mitsui, on peut lire « Mitsui a le potentiel pour travailler avec l’entreprise brésilienne SLC Agricola et produire dans les pays de langue portugaise comme l’Angola et le Mozambique, si l’Afrique ouvre ses portes à l’agriculture à grande échelle. » 7 Rioforte Annual Report 2013. 8 Entretien (an anglais) avec un membre de la communauté affectée par le projet Mozaco (Malema, juillet 2014). 9 Clement Ntauz, "Peasants accuse presidential candidates of marginalising small scale agriculture", ADECRU, 6 octobre 2014. 10 Lei de Terra e o decreto n.º 31/2012, de 8 de Agosto, Regulamento sobre o Processo de Reassentamento Resultante de Actividades Económicas. Selon le Point 2, Article 24 du décret n° 31/2012, la réinstallation sans autorisation appropriée des autorités compétentes est passible d’une amende de 2 à 5 millions de MT (60-150 dollars) et la mise en œuvre d’un plan de réinstallation non autorisé est passible d’une amende se montant à 10 % du total du projet. 11 Rioforte, États financiers consolidés pour 2013 (en anglais). 12 "Downfall of a dynasty: The last days of Ricardo Salgado and Banco Espírito Santo", Euromoney, 14 octobre 2014. 13 Rio Forte, “Consolidated statements 2013” 14 Affirmation provenant du Chargé d'Affaires américain Todd Chapman dans un câble publié parWikileaks (en anglais). 15 REMARQUE : Dans une version précédente de ce rapport, nous avions écrit, sur la base d’informations fournies par le Directeur de l’Agriculture de la province de Nampula, que l’entreprise qui avait acquis des terres sur d’anciens domaines coloniaux dans le district de Monapo était Agro Alfa Sarl. Les détails de cette série d’accaparement des terres sont corrects, mais l’entreprise impliquée est en fait Alfa Agricultura Limitada. Oksana Evguenevna Colomies Mandlate, "Ligações a Montante dos Grandes Projectos de IDE e Diversifica- ção da Economia: Estudo de Caso de Quatro Empresas ligadas com a Mozal", 2013. 16 Le Grange détient deux autres enterprises mozambicaines : Jandrilling, Ltda et Alfa Furos de Água e Fundações, Ltda. Le site Internet d’Alfa Agricultura Lda est ici : http://jandrilling.wix.com/site. 17 "Sul-africana Alfa Agriculture aposta em Moçambique", avril 2014. Video de TV2 montrant Le Grange et le ministre mozambicain de l’Agriculture à l’exploitation d’Alfa Agricultura: http://tinyurl.com/odzfxtj 18 FIN Agro website. 19 Clement Ntauz, op cit. 20 Clement Ntauz, op cit. 21 Júlio Paulino, "Mozambique: More than 1,000 people displaced from their lands in Lioma", @Verdade, 24 octobre 2014. 22 Júlio Paulino, "Mozambique: More than 1,000 people displaced from their lands in Lioma", @Verdade, 24 octobre 2014. 23 Jorge Rungo, "Agromoz introduz arroz de sequeiro", Jornal Domingo, 6 avril 2014. 24 Júlio Paulino, "Mozambique: More than 1,000 people displaced from their lands in Lioma", @Verdade, 24 octobre 2014. 25 L’information sur la situation de Wakhua provient de Júlio Paulino, "Mozambique: More than 1,000 people displaced from their lands in Lioma", @Verdade, 24 octobre 2014. 26 Júlio Paulino, "Mozambique: More than 1,000 people displaced from their lands in Lioma", @Verdade, 24 octobre 2014. 27 Júlio Paulino, "Mozambique: More than 1,000 people displaced from their lands in Lioma", @Verdade, 24 octobre 2014. 28 Voir le câble du Chargé d'Affaires américain Todd Chapman publié par Wikileaks (en anglais). 29 Penny Hayler, “New Horizons - an inclusive poultry business”, Wellspring blog, 26 October 2009; ATMS Newsletter, “Poverty alleviation in Nampula, Mozambique. Project feature – New Horizons”, 3rd quarter, 2009. 30 Boletim da Republica, 30 novembre 2007. CAZZ Services Limited est une entreprise enregistrée aux Iles Vierges britanniques (1057177) qui a été rayée du Registre des sociétés le 1er mai 2013 pour ne pas avoir payé la cotisation annuelle. 31 Boletim da Republica, 30 novembre 2007 et 29 avril 2011; Bloomberg, “Koch-Founded Super-PAC Draws $500,000 Donor in First Days”,15 juillet 2014. 32 Mozambique Fresh Eggs appartient pour 50% à CFG, 25% à New Horizons et 25% à Eggs for Africa, une autre entreprise de la Communauté de fusion qui s’occupe de la commercialisation des oeufs à Nampula. 33 Michele Linck, "Sioux Center partners aim to boost ag in Mozambique", Sioux City Journal, 26 mars 2010. 34 Mikkel Pates, "Expanding in Africa", Agweek, juin 2013. 35 Dan Charles, "Mozambique farmland is prize In land grab fever", NPR, June 2014. 36 Les filiales de l’entreprise : Aslan Global Management (Delaware, USA -2009), Aslan Global Management (Floride, USA -2009), AG Management-Mozambique, LLC (Delaware, USA -2009), AG Management-Mozambique, LLC (Florida, USA -2009), Rei Do Agro Limitada (Mozambique – 2009), Rei do Agro Holdings (Maurice -2010), Tarp Holdings LLC (Floride USA – 2010), Aslan Global Management Africa Ltd (Maurice – 2011), Aslan Group Land Holdings LLC (Floride USA 2012), and Aslan Group Land Holdings Africa Ltd (Maurice – 2012). 37 FINRA BrokerCheck Report [rapport de la FINRA sur les agents de change], 24 octobre 2014 (en anglais) 38 Brian Mahany, "REIT Fraud Alert – Paul Larsen". 39 Christopher J. Gray, P.C., "Recommendation inadaptée de FPI non échangés et d’autres produits d’investissement inadaptés" (en anglais) 40 Voir la page de DevCo sur Rei do Agro Limitada (dernière visite le 6 janvier 2015) and Direcção Nacional de Promoção do Desenvolvimento Rural, PROJECTO DE PARCERIAS ENTRE COMUNIDADES E INVESTIDORES : RELATÓRIO DE ACTIVIDADES (janvier à octobre 2013). 41 DFID, SIDA, “Annual review of the Africa Enterprise Challenge Fund (AECF)”, 2013. 42 Carrie McDermott, “Farming in Africa”, Wahpeton Daily News, 6 septembre 2012. 43 Friends of the Earth Mozambique et UNAC, "Les seigneurs de la terre : une analyse de l’accaparement des terres au Mozambique", mars 2011 (en anglais). 44 Plusieurs instances de financement du développement fournissent des fonds à Corredor Agro par l’intermédiaire du Grassroots Business Fund, notamment l’OPIC, la DEG, la FMO, la Norad, l’IFC, l’OeEB, le Canada et le Luxembourg. 45 Dan Koeppel, "Has The End Of The Banana Arrived?", Shpot, 13 mai 2014. 46 "Partnership with Dole Fruit to boost banana production", MNA, 31 janvier 2014. 47 COMESA, IITA, FAO, et al., “Development of a strategy to address the threat of Foc TR4 in Africa”, 23 avril 2014 (rapport en anglais). 48 Quifel Energy Moçambique, Lda est devenu Quifel Natural Resources Moçambique, Lda quand la société-mère Quifel Energia SA est devenue Quifel Natural Resources SA, en décembre 2009. 49 Avillez est l’un des partenaires de la firme MGA Advogados avec José Oscar Monteiro, ancien ministre du parti FRELIMO. Jeque est le président de l’opérateur de tourisme Mozaico do Indigo S.A, qui appartient à l’État. 50 La répartition des parts était alors de 79, 5% pour Hoyo One, Ltd, 20% pour Lioma – Agricultura e Projectos de Gestão, Limitada et 0,5% pour Hoyo Two, Ltd. 51 Boletim da Republica, III SÉRIE — Número 5, 2 février 2011. 52 Appel à manifestation d’intérêt du RDC, avril 2013 (en anglais). 53 African Century Matama, Limitada appartient à 80% à African Century Agriculture, Limited et à 20 % à la Fundaçao Malonda. 54 "Matama: o monstro está a despertar", Jornal Domingo, 24 février 2013. 55 "Aqui se pode produzir mais", Jornal Domingo, 24 février 2013. 56 "Dubieuze bankier in vastgoedproject prins", Ambtenaar., 14 novembre 2009. 57 Wikipedia: the Machangulo Affair. 58 Trigon Capital Annual Report 2012. 59 Ingman détient l’Ingman Group et a fait fortune en vendant Ingman Ice Cream à Unilever en 2011. Selon une brochure de l’entreprise datant de février 2014 (en anglais), Trigon Capital se proposait de lever 3 millions de dollars investor dans une société danoise, Investor SPV, qui appartiendrait pour 20% à Trigon Capital AS. Investor SPV et Strategic Investors, une entreprise gérée et très probablement détenue par Trigon Capital, reprendraient alors ensemble 51 % de Trigon MozAgri. Les 49% restants appartiendraient à une famille sud-africaine family “qui a fait ses preuves en fondant et en développant la plus grosse enterprise de production de coton du Mozambique". 60 "Helenius vallutab Aafrikat", Aripaev, 20 novembre 2014. 61 John Hewlett a été responsible des investissements de Lonrho en matière d’agriculture dans le Nord du Mozambique. 62 Correction: In the original report we suggested in this footnote that there might be a connection between Caravel Development, Caravel Limitada and Athol Emerton. Subsequent to publishing report, we received a letter from an attorney of Emertion clarifying that there is no connection between Caravel Development and Mr. Emerton. We have therefore removed this reference. Our apologies.