https://grain.org/e/1312

Nyéléni 2007 : Forum Mondial sur la souveraineté alimentaire (Suite et fin)

by Syndicat National des Paysans du Bénin | 15 Feb 2007

Position du Syndicat National des Paysans du Bénin (Synpa)

Pour la Synergie Paysanne, la jouissance par nos communautés de ces différents droits répond au libre choix des paysans des techniques de production ainsi que le libre accès aux ressources génétiques nationales, régionales et internationales.

Mais, depuis les premières commercialisations en 1994 des OGM, ce droit est mis à rudes épreuves : les brevets qui risquent d’avoir des conséquences graves pour les paysans et populations du Bénin qui, à 70% est rural, dépend de la production agricole. Les variétés de plantes cultivées sont le résultat d’un processus de sélection basée sur la production et l’utilisation de semences de ferme essentielles pour la préservation de la diversité génétique agricole et la souveraineté alimentaire.

Le 06 mars 2002, en Conseil des Ministres, le Bénin est placé par décret sous un moratoire de cinq (05) ans. Durant cette période, l’importation, la commercialisation et l’utilisation de produits OGM ou dérivés sont interdits. Cinq (05) ministères ont été instruits pour prendre des responsabilités dans la mise en œuvre du moratoire. Mis à part la ratification du protocole de Carthagène, plus rien n’est fait, sauf la mise en place d’un comité national de biosécurité mort-né.

L’incompréhensible pour le commun des béninois, c’est le comportement de l’Institut National des Recherches Agronomiques du Bénin (INRAB) et du Centre Béninois de Recherche Scientifique et Technique (CBRST) qui ont pourtant été à l’origine du moratoire. Ils sont restés tout le temps muets comme leurs collègues de la santé, de l’enseignement supérieur et de l’environnement.

Les tables rondes télévisées et radio – diffusées, et les enquêtes sont restées lettres mortes. Les étiquetages de produits pour renseigner les consommateurs en produits OGM qu’en a – t –on fait ? Ou alors, s’est-il agi d’un ‘’ opéra bouffe’’ dans cette affaire comme le font habituellement nos cadres et décideurs au Bénin et en Afrique? Nous avons vu dans cette Afrique des ténèbres, des chefs d’Etats francophones prononcer des discours en anglais à cause des OGM. Les dollars seraient – ils entre temps passés au Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche (MAEP) ?, au Ministère de l’Environnement de l’Habitat et de l’Urbanisme (MEHU) devenu depuis l’année dernière Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature (MEPN) ?, au Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS) ? et au Ministère de la Santé Publique ? Sinon, pourquoi ce silence assourdissant ?

On a comme l’impression que toutes les Institutions de la République sont toutes complices, surtout l’Assemblée Nationale qui depuis, a promis d’interpeller le gouvernement et qui, elle aussi, adopte la même attitude en couvant des œufs pourris par la chaleur des dollars américains comme font nos cadres. Nous sommes conscients aujourd’hui que la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International et l’UEMOA n’ont jamais voulu de la souveraineté alimentaire des pays pauvres. En effet, sur la question de l’accès à la terre, selon la banque mondiale, les réformes agraires / foncières doivent être des réformes assistées par le marché et par la protection des droits de propriété. Ce concept présuppose que la loi de l’offre et de la demande peut s’appliquer au problème foncier. Il s’agit là de la marchandisation de la terre et que le paysan doit donc négocier avec les grands propriétaires terriens. Cela pousse, selon la banque mondiale, le paysan à prendre des initiatives, et le force à trouver des solutions pour rendre sa terre plus productive. Reconnaissons là tout de suite qu’il s’agit de politiques macro – économiques dictées par une économie de marché qui favorise les multinationales, en ne plaçant pas réellement les paysans et leur communauté au centre du dispositif du développement national. La Banque Mondiale, ce faisant, promeut la globalisation du marché alimentaire industriel, la libéralisation des échanges, la privatisation et la promotion du génie génétique dans l’agriculture, donc des OGM. Il s’agit donc d’un complot. Nous sommes tous interpellés, que nous soyons du Sud ou du Nord. Mobilisons – nous d’avantage car pour nous, les mécanismes de la Banque Mondiale à travers les Programmes d’Ajustement Structurel (PAS) ne réduisent pas la pauvreté, mais favorisent plutôt les multinationales et les grands producteurs. Nous sommes également conscients des pressions des différents relais de la Banque Mondiale, et du manque de patriotisme de nos élites qui ignorent que les moyens d’existence des millions d’agriculteurs sont de ce fait en péril, en acceptant les instruments de corruption que sont entre autres, le Millénium Challenge Account (MCA) des Etats Unis (cinq milliards de dollars par an) à un groupe de pays dont le Bénin.

Décideurs politiques, chercheurs du Bénin et d’Afrique, sachez que malgré votre volonté d’aller contre les désirs des paysans de continuer à puiser dans leur patrimoine génétique agricole encore vierge, les organisations paysannes et les associations de consommateurs n’accepteront jamais les essais en champ des OGM, contre des millions de dollars US. Elles se lèveront toutes, comme un seul homme pour procéder aux arrachages des plants génétiquement modifiés où qu’ils se trouvent.

Qui jusqu’à ce jour a pu contrôler les risques liés aux OGM, la contamination, les risques liés à la consommation ? Alors contrôlons la morale de l’histoire à son début.

Vive l’agriculture paysanne ! Vive la souveraineté alimentaire ! Vive la solidarité entre les peuples ! Non à l’assujettissement des paysans !

Fait à Sè (Bénin), le 4 Janvier 2007

Author: Syndicat National des Paysans du Bénin